Arc jurassien

Pour un canton de l'Arc jurassien !
Texte publié dans l'Express et l'Impartial du 27 novembre 2008

Dans sa contribution du 19 novembre à la rubrique "l'invité", Maxime Zuber met en garde Neuchâtel contre la tentation de s’inviter aux réflexions de l’Assemblée interjurasienne sur l’avenir du Jura et du Jura bernois. « Craindre comme la peste la Question jurassienne » semble être une vieille attitude neuchâteloise dont l’auteur espère qu’elle durera, pour éviter de voir compliqué le travail devant mener à un Jura réunifié à six communes.

On admet bien volontiers que les partisans du statu quo puissent se servir de Neuchâtel pour chercher à enliser le débat interjurassien sous prétexte d’élargir la réflexion. Mais cette appréhension ne suffit pas à repousser à un prochain siècle la question de la création d’un canton de l’Arc jurassien, réunissant les deux Jura et Neuchâtel.

Depuis le temps des luttes qui conduisirent à la création du canton du Jura, il y a trente ans, le monde a changé et la Suisse avec. La mobilité a explosé, l’économie s’est mondialisée, les métropoles se sont renforcées, les centres de décision ont quitté pour elles les régions périphériques et la réflexion sur l’avenir de nos institutions s’est amorcée. On a admis que la plupart des communes suisses étaient trop petites pour survivre. De Lugano au Val-de-Travers en passant par le Val d’Anniviers, des fusions jadis impensables ont été votées. Aujourd’hui, c’est la division de la Suisse en 26 cantons qui doit repensée. Beaucoup de nos Etats confédérés sont trop petits pour offrir des services publics de qualité et régater face aux régions d’Europe. Les collaborations se multiplient, dans le cadre de structures au contrôle démocratique déficient. Beaucoup d’énergie et de moyens se perdent dans la multiplication de solutions locales à des questions peu différentes d’un bout à l’autre de la petite Helvétie.

Il n’est dès lors pas étonnant que l’étude de l’IRER de l’Université de Neuchâtel conclue que la réunion du Jura et du Jura bernois générerait quelques 130 millions de francs d’économie. Mais même avec 120'000 habitants, le nouveau Jura serait trop petit, tout comme Neuchâtel est trop petit avec 170'000 âmes. Hors des zones métropolitaines de Zurich, de Bâle ou du Léman, ces entités restent trop faibles pour faire mieux que vivoter en se plaignant de n’être guère entendues au Palais fédéral ou à la Bahnhofstrasse.

La constitution d’un canton de l’Arc jurassien d’une quinzaine de communales est la seule option raisonnable pour éviter la marginalisation. Unis par leur tissu économique et leur esprit d’ouverture, les deux Juras et Neuchâtel formeraient un canton cohérent, de 300'000 habitants, certainement plus performant pour ses citoyens, plus léger fiscalement mais plus lourd politiquement.

On peut dégager en corner, arguant qu’il faut d’abord réunir les Juras avant d’envisager une fusion avec Neuchâtel. Autant enterrer tout de suite le projet. Une union de cantons est une opération suffisamment complexe pour qu’on puisse douter que la motivation existe à répéter l’exercice deux fois de suite. Et dans l’intervalle, l’Arc jurassien sera devenu plus marginal encore. L’Histoire ne repasse pas les plats. C’est aujourd’hui qu’il faut se mettre à table !